Tokyo 1994 – Jardin de Kyosumi

« Yuna, Maman a une course à faire. Elle revient très vite. Continue de jouer ma chérie. »

Sa mère avait à peine fait quelques pas qu’elle est revenue en courant pour prendre la petite fille de 4 ans dans ses bras. La serrant bien fort, elle lui dit

« Yuna, tu sais que Maman t’aime hein ? Qu’elle t’aime plus que tout au monde et que jamais ça ne changera. »

Après un dernier baiser, la  femme repartit en courant mais Yuna avait eu le temps de voir le visage baigné de larmes de sa mère. Ce fut la dernière image qu’elle aura d’elle. Une image qui ne cessera de la hanter toute sa vie…

Tokyo, un an plus tard

« Yuna, tu vas suivre ce gentil monsieur. Il t’a adopté et va t’emmener en Russie avec lui. »

Levant les yeux, Yuna découvrit un homme qui ne ressemblait en rien à ce qu’elle avait pu voir jusqu’à maintenant. Cet homme était sans nul doute le plus grand et le  plus blond qu’elle avait vu de sa vie. Son premier réflexe fut de prendre ses jambes à son cou et de partir loin d’ici. Mais l’homme sembla deviner ce qui se passait dans la tête de la petite à ce moment car il la prit dans ses bras et la souleva de terre. Le déclic se fit lorsqu’il plongea ses yeux verts dans les yeux noirs de l’enfant. Un courant passa entre eux et un lien indestructible se construisit alors. Ils ne surent ni comment ni pourquoi mais leurs destins furent scellés.
Aleksandr Tchernienko, de son nom, était un richissime homme d’affaires russe. De passage à Tokyo, il en profita pour passer par un orphelinat et y adopter une petite fille. Sa femme avait toujours rêvé d’avoir un enfant mais malheureusement, ils n’avaient jamais pu en avoir. Aussi, avaient-ils décidé d’adopter mais à l’étranger car les procédures étaient bien trop longues en Russie. Et puis, Aleksandr voulait adopter une petite japonaise. Appelez cela un caprice si vous voulez mais c’était son choix.

Dès le début, Yuna – son père adoptif avait tenu à ce qu’elle garde son prénom et lui avait juste donner comme deuxième prénom le sien, Aleksandra – et son père eurent une relation des plus fusionnelles. Elle le suivait partout et faisait tout pour lui faire plaisir. De son côté, Aleksandr n’était pas en reste. Il était littéralement tombé amoureux de la petite japonaise, sa petite lune comme il l’appelait. Rien n’était trop beau pour sa petite fille adorée.
Bien que gâtée, Yuna n’en était pas pour autant une petit fille pourrie gâtée. Son père était très stricte et tenait à ce qu’elle soit le mieux éduquée possible. Heureusement, Yuna avait une bonne nature et son seul désir était de remplir tous les rêves de son père à son égard. Aussi travaillait-elle dur à l’école même si elle avait des facilités. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle avait été prise dans une classe conçu spécialement pour les élèves les plus brillants. Outre ses études, elle avait des cours de langue. Bientôt le japonais, le chinois, l’anglais et le français n’eurent plus de secret pour elle. Elle faisait tout pour que son père soit fier d’elle.
Son seul hobby était la musique. Voyant la passion que sa fille avait pour ce loisir, son père lui offrit des leçons de guitare ce qui la rendit encore plus heureuse. Elle adorait cet instrument et composait pour son père des petites chansons qu’elle lui chantait lors de leurs moments à deux.
Mais tout au fond de son cœur, la petite adoptée n’avait jamais pu oublier sa mère biologique. La dernière image qu’elle avait d’elle était restée gravée dans son cœur. Yuna n’arrivait pas à comprendre le geste de sa mère et s’était promis de tout faire pour la retrouver et ainsi obtenir des explications. Cela, elle ne le dit pas à son père. Aleksandr était son héros et pour Yuna c’était son père. Elle ne voulait pas lui faire de la peine en lui faisant part de ce qui la taraudait.

De part le système éducatif de son père, Yuna avait développé le goût du challenge. Elle voulait toujours être la première partout et faisait tout pour y arriver. Seul ombre au tableau, un certain Konohan Voltchkov. Le père de ce dernier possédait une entreprise concurrente de celle d’Aleksandr et Konohan avait le même âge que Yuna. Les deux enfants furent rapidement en compétition sur tout, la rivalité des entreprises de leurs pères respectifs déteignant sur eux. Yuna n’était jamais plus heureuse que lorsqu’elle battait le fils Voltchkov dans un domaine.
Aussi le prit-elle très mal lorsqu’une fois adulte, son père fit confiance à Konohan pour la branche pas très légale de ses affaires. Yuna était effectivement au courant de toutes les affaires de son père, ce dernier ne lui cachant rien. Elle comprenait les raisons qui le poussaient à ne pas laisser sa fille adorée s’en occuper elle-même, préférant lui confier la branche légale mais ce fut un coup dur pour la jeune femme. Elle était obligée de travailler avec son rival de toujours. Elle fut bien obligée de reconnaître que son père avait eu du flair sur ce coup, car Konohan était son alter ego au masculin. A eux deux, ils formaient une bonne équipe, une excellente même.
Tout allait donc pour le mieux dans le meilleur des mondes quand le corps sans vie d’Aleksandr Tchernienko fut retrouvé dans une petite ruelle de Saint-Pétersbourg. Le monde de Yuna s’écroula alors. Rapidement, la jeune femme soupçonna Konohan d’être derrière tout ça. Et quand elle apprit que ce dernier était parti à Saint-Pétersbourg car Aleksandr lui avait légué ses parts de la Rose Rouge, elle décida elle-aussi d’y aller. De toute façon, en tant que PDG de Tchernienko Inc., elle ne pouvait rester à Moscou. Et là-bas, elle aura plus de latitude pour mieux surveiller son rival et préparer sa vengeance.