« Ludmila, descend dans le salon. Nous avons une grande nouvelle à t’annoncer » Je relevai la tête de mes cours avant de me dépêcher de rejoindre mes parents. Mon père n’aimait pas attendre. Il estimait que mon frère et moi lui devions obéissance. Je ne me rappelle pas l’avoir déjà vu toléré ne serait-ce qu’un seul écart. Surtout envers Levine. Je jetai un œil dans le miroir mural de ma chambre, vérifiant que j’étais impeccable et descendit doucement les marches. « Pourquoi m’avez-vous fait appeler, père ? » Mon géniteur se retourna en entendant ma voix. Il avait un grand sourire sur le visage alors qu’il m’indiquait un fauteuil où se trouvait un ami de mon père. Je trouvais ça étrange et une boule commençait à se former dans mon ventre. Une sensation que je détestais tout particulièrement. « Dimitri et moi avions convenu d’une affaire qui te concerne entièrement. Je ne crois pas que tu as déjà rencontré Lyov, son fils mais, peu importe. A partir de demain, vous allez vous fréquentez. Il a sept ans de plus que toi et il est destiné à devenir ton futur mari quand tu auras dix-huit ans. » Je savais que je n’avais pas mon mot à dire sur la décision sur mon père. Il ne l’accepterait pas. Jamais. Je n’aurais qu’à faire mes valises et dire à mon adieu à mon héritage. Le sol s’ouvrait sous mes pieds alors que la nouvelle contaminait peu à peu mon cerveau et que j’entendais mon père discutait des festivités avec mon futur beau-père. Je remontais dans ma chambre après avoir eu son autorisation avant de m’écrouler sur le lit en pleurs. J’avais quinze ans et j’étais déjà emprisonné par une union que je ne désirais pas…  

Je regardai Levine faire le tour de la pièce, légèrement agacé par la situation actuelle. Notre père avait encore frappé en annulant ses fiançailles avec Yulia. La jeune fille avec qui il était depuis deux ans. « Lev, je t’en prie, arrête de faire les cents pas. Tu vas finir par me donner mal au crâne » Il s’arrêta comme si il se rappelait de ma présence et plongea ses iris dans les miens avant de me rejoindre. « Je suis désolé, c’est juste que je ne le comprends plus. Il m’a presque imposé Yulia et ce n’est que quand je commence à avoir de réels sentiments pour elle qu’il arrête tout. C’est incompréhensible. » J’étais sincèrement désolée pour lui. Mon frère avait l’air de vraiment tenir à cette fille que je connaissais à peine. Je n’avais jamais ressenti le besoin de la connaître. A vrai dire, sa tête de poupée fragile me sortait par les yeux. Peut-être n’était-ce pas une si mauvaise chose que mes parents aient rompu les fiançailles… « Tu sais très bien que tout ce qui intéresse Père et Mère, c’est la puissance, la réputation… Ils ne s’arrêtent pas à des notions aussi abstraites que l’amour. » Il me fixait comme si j’avais été doté d’une deuxième tête. J’esquissai un sourire. Je savais très bien à quoi il pensait en cet instant. A ma crise de colère, il y a deux ans le lendemain de l’annonce de mes fiançailles. Une vraie furie. « Ça va aller, Levine. Je suis là. Je serai toujours là. » Sur ces mots, je l’enlaçais afin de le réconforter. Je sentis ses bras dans mon dos quand il répondit à mon étreinte puis plus tard, ses lèvres sur mon cou. Ses mêmes lèvres qui, un instant plus tard, avaient rejoint les miennes. Sans un mot, il se leva avant de refermer la porte à clé. Mon sourire s’élargit. Je savais que je n'allais pas passer une partie de la nuit seule. Heureusement que la maison était vide…

J’observai d’un œil morne mon époux. Vingt-cinq ans et il était aussi actif qu’un escargot. Je m’ennuyais ferme avec lui. On était marié depuis cinq mois et je n’avais qu’une envie. Me pendre ou mieux, le jeter par la fenêtre. L’idée me tentait de plus en plus mais, ce serait problématique. A moins d’avoir un contact avec la mafia russe, je ne disposais pas des moyens nécessaires pour faire disparaître le corps. J’avais l’argent et le nom de famille pour étouffer l’affaire mais, ça s’arrêtait là. Je m’endormais à moitié quand j’entendis la porte de notre appartement luxueux se refermer. Je poussais un soupir. A tous les coups, il allait rejoindre une de ces filles de quinze ans qui avait été forcé de faire du sexe, leur métier. La rose rouge était l’endroit parfait pour ça même si à mon humble avis, ces gamines ne savaient sûrement pas s’y faire. Expérience inexistante. Elles étaient juste soumises à ces pervers qui ne cherchaient qu’à assouvir leurs désirs par la force, le chantage et que sais-je encore. Comment pouvait-on prendre plaisir à coucher avec une personne qui avait un tel état d’esprit ? Puis, l’idée s’insinua lentement en moi. Une idée de génie. J’allais les éduquer. Garçons, filles… J’en faisais mon affaire. Il ne me restait qu’à trouver le métier idéal pour intégrer la rose rouge sans attirer les soupçons de mon père. Je passais quelques coups de fils pour faire des études en communication. Quelques heures passèrent avant que mon mari ne revienne. Il resta bloqué devant la porte quand il me vit en mode petite épouse parfaite. Les illusions allaient devenir mes meilleures amies pour supporter les mois voire les années à venir.

Je travaillais sur un communiqué à destination de plusieurs journaux suite à nombre d’inquiétude que je ne cessais d’entendre sur la rose rouge. Des rumeurs sans fondements. Enfin, peut-être que si elles avaient un fondement mais, mon boulot était justement d’étouffer toute ces bêtises qui pourraient mettre en péril le bon fonctionnement de la maison close. De parler à ces journalistes dans un langage clair et concis afin qu’ils fassent circuler l’information et calmer toutes ces mères de familles et autres commères du village qui n’avait dû plus s’envoyer en l’air depuis un temps infini. Un soupir d’agacement franchit mes lèvres alors qu’on frappa à la porte. Une jeune fille. « Madame Ludmila Oulanovska ? J’ai une enveloppe pour vous de la part de Monsieur Lyov Anjeski… » Un sourire étira mes lèvres. Enfin, ce lourdaud avait signé les derniers papiers pour que notre divorce soit officiel. Il avait fait traîner l’affaire un bon moment. J’avais dû menacer de divulguer certaines de ses petites affaires pour qu’il me fiche la paix. « Merci… Je ne vous ai jamais vu dans le coin… Vous êtes nouvelle ? » Elle me regarda un instant avant de bégayer. Timide, en prime. C’était intéressant… Je passais au tutoiement afin de la mettre un peu plus à l’aise. Le lendemain soir, Ksenia revint me voir. Sa journée de travail était terminée. J’étais ravie. Elle était tellement jolie et charmante… A la fin de la soirée, nous étions dans ma chambre et je lui apprenais les joies du plaisir entre femmes.