Oksana ! Rejoins-nous dans le salon, on doit te parler avec ta mère. Assise en tailleur sur mon lit, j'entends mon père qui m'appelle. Tiens donc. En plus, il n'appelle pas ma sœur Liviya, uniquement moi. J'enfile mes chaussons avant de dévaler les escaliers pour les rejoindre. Je m'assois sur le canapé en face d'eux. Les doigts enlacés, je les regarde et ils ont cet air sérieux qui veut dire que la discussion risque d'être difficile. Voilà, Oksana. Les temps sont difficiles pour nous ici, tu le sais bien. On m'offre un contrat au Danemark, dans l'entreprise où travaille ton oncle. C'est une super opportunité pour moi, surtout que je gagnerais plus... J'agite la tête de haut en bas. En effet, je comprends la situation. D'accord. Je comprends mais qu'en est-il de mes études ?.. Je plonge mon regard dans les yeux de mon père. Il sait à quel point mes études me tiennent à cœur et, je n'ai toujours imaginé ma vie qu'à Saint-Pétersbourg. J'allais y venir, Oksana. Puisque tu vas vivre seule si tu le souhaites, nous comptions faire une demande de bourse pour que tu puisses rester ici. Donc ils étaient d'accord pour que je reste. Je ne pouvais être qu'heureuse puisque ça faisait déjà deux ans que je faisais mes études. Je n'avais aucune envie d'être déstabilisée en déménageant même si je rendrais sûrement visite à mes parents au Danemark. Après tout, ça me permettrait de me rapprocher de mes racines maternelles.

Mes parents étaient partis au Danemark il y avait déjà deux mois. Ils avaient choisi de ne pas vendre la maison pour que je puisse vivre même en leur absence. Puis, si je finissais par les rejoindre à la fin de mes études, ils vendraient la maison à ce moment-là. Ce matin-là, je reçus une lettre sur laquelle était indiquée Санкт-Петербургский государственный университет signifiant tout simplement Université d'État de Saint-Pétersbourg. Je me doutais alors qu'il s'agissait de la lettre concernant ma demande de bourse. Je me mis alors à lire à voix haute. L'Université d'État de Saint-Pétersbourg a le regret de vous annoncer que votre demande de bourse a été refusée. Nous vous invitons à réitérer votre demande l'année prochaine... Putain de merde ! Je me saisis de la corbeille de fruits et la fis valdinguer avant qu'elle ne s'écrase au sol. Comment j'allais m'en sortir ? Je n'avais pas les moyens de payer les frais d'inscription, ni les frais pour le concours et le restaurant universitaire. J'étais clairement dans la merde !

Décidée à me changer les idées, je pris contact avec une de mes camarades de classe. Elle me donna rendez-vous au Night Club. Bichette, tu as besoin de te changer les idées. On s'rejoint à la boîte habituelle. De quoi s'amuser tout en essayant de trouver une solution. Elle n'avait pas tort, j'en avais bien besoin. Je choisis de miser sur une petite robe noire passe-partout mais assez sexy, tout de même. Je pris un taxi qui me déposa en face de la boîte et Nastasya m'attendait devant l'entrée. Tu es sublime, comme d'habitude. Que devrais-je dire de toi Oksana ! Les hommes n'ont déjà d'yeux que pour toi. Je lui fis la bise tout en riant à ses mots. En habituées, nous avons pu entrer sans avoir à faire la queue. De quoi faire rager tout ceux qui attendaient. [...] Après quelques verres payés par de beaux inconnus et quelques déhanchés qui ne sont pas passés inaperçus, nous sommes allées nous asseoir à une table. Ecoute, Oks. Je sais que ce n'est pas trop ton genre mais je connais un bon moyen de te faire de l'argent rapidement. Vas-y, je t'écoute. C'est exactement ce dont j'ai besoin. Elle prit une gorgée de sa vodka puis me regarda intensément. Ne me remercie pas trop vite. Tu connais La Rose Rouge ? Enfin, tu as au moins dû en entendre parler... Je sais qu'ils recherchent des filles... De notre âge. Oui, j'avais déjà entendu parler de La Rose Rouge. Il s'agissait d'une maison close. J'étais assez réservée aux premiers abords même si j'étais une grande fêtarde, malgré tout. Je fis une légère grimace. Étais-je prête à aller si loin pour continuer mes études ? Avais-je vraiment d'autres choix ?.. Comment as-tu entendu parler de cela ? Ecoute, Oks, pour être franche avec toi, ça fait deux ans que j'y travaille. Je serais incapable de faire des études sinon... Tu crois que j'ai eu mon Birkin comment ? Elle se mit à rire et je lui souris. J'avais besoin d'y réfléchir... Quelques jours plus tard, je repris contact avec elle et j'acceptais. Voilà maintenant quatre ans que je travaille à La Rose Rouge. Je me suis familiarisée avec les lieux plus vite que je ne l'aurais cru. Evidemment, mes parents ne le savent pas. Nastasya est en fait la seule de mes fréquentations à le savoir, vu qu'elle y travaille aussi.