Mes doigts défilent comme si Beethoven me possédait pour composer une nouvelle mélodie. Mais ce genre n'est plus dans l'air du temps, aujourd'hui il nous faut des sons qui nous possèdent et qui s'emparent de nous. Il n'y a plus de noires ou de blanches, des croches ou des double-croches, seulement une série de sons aléatoires à enchaîner de la bonne manière pour, qu'inexplicablement, quelque chose se passe en nous. Un message prend forme et nous libère le temps d'une danse. Mes doigts ne parcourent pas un piano mais bien un clavier d'ordinateur. La musique est maintenant accessible à tous, et c'est sans doute ce que je trouve le plus beau dans cette évolution. Sourire en coin, je jette un rapide coup d’œil sur la piste de danse pour y découvrir les personnes en scène. Les corps se croisent, se frôlent ou bien se frottent. Sorte de préliminaires et mise-en-bouche pour la suite qui paraissait très prometteuse. Une femme sur scène ça a toujours été bien plus compliqué à accepter qu'un homme. Êtes-vous capable de me donner le nom d'une DJette célèbre ? Les hommes ont pris de l'avance mais je rêve de pouvoir les rattraper. Je garde les pieds sur Terre, je me doute que ce n'est pas moi, du haut de mes 22 balais et 1m65 qui vais révolutionner ce domaine. Mais j'y amène ma contribution, je me fais un nom dans cette nouvelle ville pour moi, cette nouvelle vie.

Les boîtes de nuit sont sympas mais je me lasse très vite de cette ambiance très répétitive. Je préfère jouer à la Rose Rouge, les sets sont bien plus subtiles, je ne peux pas me permettre d'y passer les mêmes sons qu'ailleurs. On me demande toujours une certaine ambiance à respecter mais il y a toujours une grande part de sensualité à garder. Réchauffer les gens petit à petit et les demoiselles savent faire le reste. Je les regarde, expertes dans leur domaine. J'admire leur aisance à séduire, à savoir user de leur corps si parfaits. Je me mords les lèvres, je craque comme à mon habitude, il m'en faut toujours peu ici. J'ai interdiction formelle de coucher avec les clients, hors de question de leur voler leur chiffres d'affaires du soir. Je peux avoir droit aux filles, que je les paie ou non ça, ça les regardent. Je me retrouve bien trop souvent entre leurs jambes si longues et fines dans l'une des plus petites pièces de la maison. Malgré toutes les mises en gardes et les barrières que je peux me mettre, à la Rose Rouge, tout semble s'envoler et être permis.